Histoires d'Hommes et de pêche
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Pour l'instant, il y a ce texte en hommage à François Wenger.

Moments partagés: François, Adrien et Gaël
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hommage à Adrien Morelli : Brochet 138cm
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hommage à Adrien Morelli : Brochet 127cm
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hommage personnel à François Wenger

Mes relations avec François ont forcément été liées à la pêche, plus particulièrement la gestion de la Société de pêche de Cornod et de la pratique de la pêche à la mouche. En hommage à François, je vais vous compter comment je me suis lancé dans la pratique de cette pêche si particulière. Vous comprendrez aisément que François y était pour beaucoup et largement acteur de cette passion qui m'anime.

Le réel coup d’envoi est parti d’une promesse ! C’est bizarre, ça faisait quelques années que je voulais me lancer, mais c’était difficile de faire le premier pas : Étudiant, les premiers investissements financiers que cela comportaient et aussi, peur de n’être pas à la hauteur pour franchir cette montagne fictive érigée devant moi qui était la difficulté technique de cette pêche.
Eh oui, c’est en cours de viticulture à Montpellier que ça s’est passé ! Fervent de pêche à la mouche, et ayant fait un bref passage dans le Jura au début de sa carrière, notre professeur de viticulture de l’époque, Jean-claude Cloup (s’il passe par-là, il se reconnaîtra), nous parlait parfois de pêche dans ses illustres parenthèses qui fragmentaient ses cours magistraux : « Gaël, quand te mets-tu à la mouche ? C’est la plus belle des pêches. ». Ce dont j’avais répondu :« Cette année, je vous le promets ! ». Et voilà c’était fait ! Je n’avais plus que le choix de me jeter à l’eau !

Bien sur pour moi la pêche a commencé à l’age de 4ans et demie (c’est important à cet age là) avec mon grand-père. De la pêche des petits blancs en rivière à la pêche de la truite au mort-manié, les années sont passées. Commençant à un peu mieux m’en sortir (lecture de la rivière, prises de poisson un peu plus fréquentes), tuer le poisson n’a, seulement à cet instant là, plus été une évidence. Je me suis alors largement penché sur, et inventé, des méthodes de pêche me permettant de pouvoir relâcher mon poisson dans les meilleures conditions.
Et c’est pour cette raison et à ce moment précis que j’ai voulu me mettre "à la mouche". Ce fut cette motivation là qui a déclenché le premier pas vers cette technique qui me paraissait si compliquée.

Il est évident que la beauté du geste de cette pêche, le film de Redford "Au milieu coule une rivière", les sublimes images croisées dans les magazines et documentaires m’avaient déjà titillé les neurones. D’autant que la rencontre au sein de mon village d’un fidèle pêcheur de la Valouse, qui n’avait d’égale amour pour cette pêche que celui de notre rivière, sa maison et bien sur sa femme, n’a fait que renforcer la chose.
C’était ce qu’on peut appeler aujourd’hui une ancienne main qui avait connu l’age d’or et l’essor de la pêche à la mouche en France, l’apparition du premier groupement sportif de pêche à la mouche (à Lyon), TOS,…
La pratique de la pêche en sèche et en noyée comme seule possibilité; Canne Peson et Michel Skish en bambou refendu et moulinet automatique Shakespeare comme seuls instruments pour battre le tempo: ce qui m’a toujours fasciné chez lui, c’est son amour pour la perfection. Je suis convaincu que sa motivation pour la pêche à la mouche résidait quasiment uniquement dans l’esthétisme, le dévouement et le perfectionnisme que cette technique demandait ! La beauté des belles choses et du raffinement, c’était, au départ, un paradoxe pour moi, dans ce village rempli "d’imbéciles heureux qui sont nés quelque part" ; D’ailleurs encore perçu par certains comme un nouveau, un "éstranger", après 40ans de vie et de dévouement dans cette commune !
Cette rencontre s’est très rapidement métamorphosée en une amitié plus que fusionnelle qui s’est stoppée physiquement, il y a un an par son départ brutal.

FW mise en place du NK

La mise en place du parcours "No-Kill", notre fierté

Nous avons tellement partagé de de longs moments de discussion autour de la gastronomie, les bons vins et la pêche à la mouche. Je lui racontais mes progressions dans cette technique et notamment dans certaines qu'il n'avait jamais pratiquées comme la nymphe à vue, la traque des grosses truites,... Et lui me contait ses souvenirs de cet âge d'or, ses excursions dans les rivières mythiques avec ses amis d'époque, l'arriver des clubs de pêche dont il avait été membre du premier de France à Lyon,... Deux mondes bien différents! Mais que nous écoutions, chacun notre tour, attentivement et avec la lueur dans les yeux qu'ont tous les passionnés.

Il y eu beaucoup de bons moments comme celui-ci, mais en réalité, peu de parties de pêche partagées. Lorsque je me suis mis à la pêche à la mouche, François après des problèmes à l'épaule a perdu confiance en lui pour pratiquer cette pêche. C'est pas faute de l'avoir sollicité, mais il a toujours refuser l'invitation.

Sauf une fois, le 27 juin 2008. C'était une journée parfaite pour pratiquer la pêche à la mouche. La rivière sortait d'une longue période d'eaux hautes et de crues. La journée était ensoleillée, les eaux étaient relativement claires et les poissons, nous l'avions constatés la veille, devaient être assez actifs.

Une journée de pêche, rien qu'entre nous: François, Adrien et moi.


FW et AM 27.6.11
Les deux compagnons de cette fameuse partie de pêche du 27 juin 2008,

Forcément nous avions décidé de pêcher le haut du parcours de pêche notre société de pêche. Là où était positionné le premier parcours "no-kill". Tous les trois, nous nous étions tant battu pour que ce parcours voie le jours.

Ce jour là les truites n'étaient pas si actives que ça. Je ne me souvient plus si nous avions pris du poisson. Mais c'était loin d'être notre préoccupation première, même si au fond de moi, je ne souhaitais qu'une chose, c'est que François touche au moins un poisson; juste pour lui redonner confiance en lui; peut-être un déclic pour qu'il retrouve le goût de pratiquer. D'autant qu'après de longues années de non-pratique, il n'a pas mis longtemps à reprendre la main. La soie de sa vieille canne en bambou refendu volait de façon fluide et formait, dans l'air, des boucles si singulières des cannes à action parabolique.

Mais là n'était pas l'essentiel! Ce qui était important c'était le partage! Nous avons pu mettre des images sur ce qu'on avait pu lui expliquer: les fraies des fantasques barbeaux, la pêche en nymphe au fil, et surtout la nymphe à vue. Nous avons pu partager de longues minutes à observer une chose assez rare sur la Valouse: une grosse truite, sur une gravière, qui se nourrissait en fouillant les galets. Nous avions pu l'approcher de très prêt. Nous avions même pu lui faire quelques présentations sans résultats. Dans cette partie de pêche, nous avions un peu inversé les rôles. Adrien et moi, lui avons enseigné d'autres façons de concevoir la pêche en observant ce qui se passe de l'autre côté de la surface.


FW 27.6.11

Pas facile d'accrocher sa mouche après des années et une vue qui a certainement du baisser

Dans ses paroles et dans ses yeux nous avions pu comprendre qu'il vivait ce jour là un moment exceptionnel. Nous partagions également ce sentiment. Je crois que cette journée reste, pour moi, l'une des plus belles de ma vie.

Autant, aujourd’hui, lors de chacune de mes prises, j’ai une pensée pour mon père et mon grand-père partis, également,  trop tôt. Autant chaque moment passé au bord de l’eau, chaque instant passé à penser aux rivières et à la pêche (et dieu sait qu’il y en a !) et chacune de mes contributions dans le milieu associatif, c’est avec la mémoire de François que ça se passe.

La pêche, c’est avant tout une passion partagée avec des Hommes.


À François,


Gaël Delorme, le 18 décembre 2011
 

 
 



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